Cet article recense les pratiques inscrites au patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO en Turquie.
Comprendre
modifierLe pays compte dix-sept pratiques reprises sur la « liste représentative du patrimoine culturel immatériel » de l'UNESCO et une pratique reprise sur la « liste de sauvegarde d'urgence ».
Aucune pratique supplémentaire n'est reprise dans le « registre des meilleures pratiques de sauvegarde de la culture ».
Listes
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modifierPratique | Année | Domaine | Description | Illustration |
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1 Le Sema, cérémonie Mevlevi | 2008 | * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs |
Les Mevlevi sont un ordre ascétique soufi fondé en 1273 à Konya, d’où ils ont progressivement essaimé dans tout l’empire ottoman. Aujourd’hui, on trouve des Mevlevi dans de nombreuses communautés turques à travers le monde, mais les centres les plus actifs et les plus célèbres restent ceux de Konya et d’Istanbul. Les Mevlevi sont connus pour leur danse giratoire. Après un jeûne recommandé de plusieurs heures, les derviches tourneurs commencent à tourner sur eux-mêmes, prenant appui sur le pied gauche et utilisant le pied droit pour pivoter. Le corps du danseur doit être souple, les yeux doivent rester ouverts, sans rien fixer afin que les images deviennent floues et flottantes. Pendant les cérémonies de danse, ou Sema, un répertoire musical particulier appelé ayın est joué. Comprenant quatre parties de compositions vocales et instrumentales, il est exécuté par au moins un chanteur, un flûtiste ou neyzen, un joueur de timbale et un joueur de cymbales. Les danseurs étaient formés lors d’une retraite de 1 001 jours dans des cloîtres mevlevi (mevlevihane) où ils apprenaient les règles d’éthique, les codes de conduite et les croyances par une pratique quotidienne de prière, musique religieuse, poésie et danse. Au terme de cette formation, ils retournaient à leur famille et travail tout en restant membre de l’ordre. Les politiques de sécularisation ont conduit à la fermeture de tous les mevlevihane en 1925. Dans les années 1950, le gouvernement turc a de nouveau autorisé les cérémonies, mais seulement en public, avant de lever cette restriction dans les années 1990. Certains groupes privés s’efforcent de redonner à la cérémonie du Sema son caractère spirituel et intime original. Mais les trente années de pratique clandestine ont privé le sema d’une partie de sa signification religieuse, la transmission ayant été axée sur la musique et les chants au détriment des traditions spirituelles et religieuses. Aujourd’hui, nombre de cérémonies ne se déroulent plus dans leur contexte traditionnel mais devant un public de touristes et ont été raccourcies et simplifiées pour répondre aux exigences commerciales. |
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L’art des Meddah, conteurs publics | 2008 | traditions et expressions orales | Le meddahlik était une forme d’art dramatique turc interprétée par un acteur unique, le meddah, et pratiquée dans toute la Turquie et les pays turcophones. Au fil du temps, des genres narratifs similaires se sont multipliés dans ce vaste espace géographique, par interaction entre les peuples d’Asie, du Caucase et du Moyen-Orient. Historiquement, la vocation des meddahs était non seulement de distraire, mais aussi d’éclairer et d’éduquer le public. Ces conteurs, que l’on pouvait entendre dans les caravansérails, les marchés, les cafés, les mosquées et les églises, propageaient des valeurs et des idées au sein d’une population souvent illettrée. Leurs critiques sociales et politiques déclenchaient régulièrement de vives discussions sur les sujets d’actualité. Le terme meddah, de l’arabe maddah « faire l’éloge de quelqu’un », peut se traduire par « conteur ». Le meddah choisit des chants et des récits comiques parmi un répertoire de romances, de légendes et d’épopées populaires, et les adapte au lieu et au public. Mais c’est avant tout la relation qui s’établit avec les spectateurs qui fait la qualité de sa prestation, de même que son talent à combiner imitations, plaisanteries et improvisation, souvent sur des thèmes d’actualité. Cet art, qui attache une grande importance à la maîtrise de la rhétorique, est tenu en haute estime en Turquie. Bien que certains meddahs se produisent encore lors de fêtes religieuses et laïques, ainsi qu’à la télévision, le genre a perdu beaucoup de sa fonction éducative et sociale originelle en raison de l’essor des médias, en particulier l’apparition de postes de télévision dans les cafés. |
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Le Karagöz | 2009 | * traditions et expressions orales * arts du spectacle * ratiques sociales, rituels et événements festifs |
Le Karagöz est une forme de théâtre d’ombres turc dans lequel des silhouettes appelés tasvirs, fabriquées à partir de peau de chameau ou de bœuf et représentant des personnages ou des choses, sont tenues au bout de tiges devant une source de lumière pour projeter leur ombre sur une toile de coton qui sert d’écran. La pièce commence par la projection d’un personnage de présentateur qui plante le décor et suggère les thèmes de l’histoire, avant de disparaître au son strident d’un sifflet, cédant la place à la pièce proprement dite, laquelle peut comprendre du chant, du tambourin, de la poésie, l’évocation d’un mythe, des exercices de diction et des devinettes. Généralement comiques, ces histoires mettent en scène deux personnages principaux, Karagöz et Hacivat, et toute une kyrielle d’autres, notamment une chanteuse de cabaret appelée Kantocu et un acrobate illusionniste, Hokkabaz ; elles abondent en jeux de mots et imitations des accents régionaux. Les marionnettes sont manipulées par un artiste principal, le Hayali, parfois avec l’aide d’un ou de plusieurs apprentis assistants qui se forment à cet art en participant à la fabrication des tasvirs et en jouant de la musique pour accompagner l’action. Autrefois très souvent joué dans les cafés, les jardins publics et privés, en particulier pendant le ramadan ainsi que lors des fêtes de circoncision, le Karagöz est aujourd’hui donné principalement dans les salles de spectacle, les écoles et les centres commerciaux des grandes villes où il continue d’attirer le public. Le théâtre traditionnel renforce le sentiment d’identité culturelle, tout en rapprochant les individus par le truchement du divertissement. |
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La tradition Âşıklık (de l’art des trouvères) | 2009 | * tradition et expression orales * arts du spectacle * pratiques sociales, événements rituels et festifs |
La tradition Âşıklık (de l’art des trouvères) est perpétuée en Turquie par des chanteurs-poètes itinérants, appelés âşıks". Vêtus de la tenue traditionnelle et grattant sur un instrument à cordes appelé saz, l’âşık se produit souvent dans les mariages, dans les cafés et lors de festivals publics de toutes sortes. L’âşık est appelé, lors d’un rêve, à entreprendre le long apprentissage de l’art de jouer des instruments à cordes et à percussion, du chant, du récit oral et de la répartie qui est au cœur de la vocation. Les poèmes qu’il récite et qui parlent généralement d’amour, sont écrits en mètres syllabiques rimés et se terminent par un quatrain dans lequel l’âşık prononce les Mâhlas, son pseudonyme. Les improvisations peuvent aussi inclure des devinettes, des contes traditionnel, des joutes verbales et de créativité avec d’autres âşıks, ainsi que des vers chantés avec une aiguille dans la bouche pour se forcer à réciter des poèmes en évitant les sons B, P, V, M et F. En allant de communauté en communauté, les âşıks contribuent à répandre les valeurs culturelles et les idées et à faciliter un dialogue social fort, en partie à travers la satire sociale et politique ainsi que la poésie sur des thèmes d’actualité. Aux mariages, en particulier, les âşıks sont considérés comme des instructeurs et des guides dont la tradition s’inspire de la culture littéraire turque et l’enrichit, comme elle enrichit la vie quotidienne des communautés du pays. |
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2 Le festival de lutte à l’huile de Kırkpınar | 2010 | * traditions et expressions orales * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs * artisanat traditionnel |
Le festival de lutte à l’huile de Kırkpınar se déroule à Edirne, en Turquie. Des milliers de personnes de différentes classes d’âge, cultures et régions se déplacent chaque année pour voir s’affronter les pehlivans (lutteurs) en quête de la ceinture d’or de Kırkpınar et du titre de pehlivan en chef. Chaque festival est lancé par son patron, l’aga de Kırkpınar, lors d’une cérémonie où se produisent quarante ensembles de joueurs de davul (grosse caisse) et de zurna (flûte). La ceinture d’or est portée à travers la ville au cours d’une procession, suivie de prières récitées à la mosquée Selimiye. Les tournois de lutte ont lieu traditionnellement sur le « champ de bataille ». Le maître de cérémonie présente les pehlivans au public en clamant en vers leurs noms, leurs titres et leurs exploits. Ensuite, le huileur aide les lutteurs à s’enduire d’huile, assisté du porteur de serviette, avant les exercices d’échauffement et le salut. Les lutteurs portent le kıspet, pantalon épais taillé dans un cuir de vache ou de buffle d’eau. Tandis que se déroule le tournoi, les joueurs de tambour et de flûte exécutent le répertoire traditionnel du festival. La lutte à l’huile de Kırkpınar est ouverte aux hommes de toutes cultures, régions et classes d’âge sans discrimination religieuse, linguistique ou raciale. Les pehlivans sont considérés comme des personnages exemplaires de la société ayant des qualités telles que la générosité, l’honnêteté, le sens du respect et l’attachement aux us et coutumes. Tous les pehlivans sont formés selon la tradition maître-apprenti. |
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Les rencontres traditionnelles Sohbet | 2010 | * traditions et expressions orales * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs |
Les rencontres traditionnelles Sohbet jouent un rôle crucial dans la transmission de la littérature, des danses et de la musique populaires, des spectacles de village ainsi que des valeurs sociétales de la Turquie. Les hommes turcs se réunissent régulièrement à l’intérieur, surtout en hiver, pour discuter des problèmes sociaux et culturels locaux, sauvegarder les traditions et encourager la solidarité, le respect mutuel et le sens de la communauté. Les rencontres peuvent comporter de la musique, des danses et des spectacles, autant de divertissements appréciés tout en dégustant des plats locaux. Une rencontre traditionnelle Sohbet peut durer jusqu’au petit matin. Les rencontres sont accessibles aux hommes âgés de plus de 15 ou 16 ans, quels que soient leur ethnie, leur religion ou leur statut, la condition élémentaire requise étant que les membres soient issus d’une famille honnête, qu’ils soient dignes de confiance et respectueux de leurs aînés, et qu’ils n’aillent pas s’adonner au jeu ou errer en état d’ébriété. Les membres risquent d’être pénalisés en ayant une amende à payer s’ils viennent à manquer une rencontre, sauf en cas de circonstances atténuantes. Les mères et les épouses incitent les membres masculins à y assister en raison des avantages sociaux et culturels qui y sont associés. Les communautés comptent en général cinq à trente personnes et sont guidées par des chefs nommés à l’issue d’un vote ou sur proposition des aînés. Les membres de la communauté ont tous les mêmes droits et obligations. Les rencontres Sohbet revêtent une importante fonction éducative en transférant des valeurs éthiques telles que la justice sociale, la tolérance, la bienveillance et le respect. |
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Le Semah, rituel Alevi-Bektaşi | 2010 | * expressions et traditions orales * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs |
Les Semahs peuvent être décrits comme un ensemble de mouvements corporels mystiques et esthétiques exécutés en harmonie rythmique. Ils constituent l’un des douze grands services des rituels Cem, pratiques religieuses auxquelles se livrent les fidèles de l’ordre Alevi-Bektaşi, un système de croyance fondé sur l’admiration d’Ali, quatrième calife à la suite du prophète Mohammed. Les Semahs sont exécutés par les semahçıs (danseurs de Semah), accompagnés par des musiciens dévots qui jouent du saz, luth à long manche. Il existe différentes formes de Semah dans les communautés Alevi-Bektaşi à travers la Turquie, chacune avec des caractéristiques musicales et des structures rythmiques distinctes. Une caractéristique constante est la représentation du rituel exécuté à la fois par des hommes et des femmes, côte à côte. Les rituels des Semahs reposent sur le concept de l’unité avec Dieu qui se réalise à travers un cycle naturel : l’être humain vient de Dieu et retourne vers Dieu. Il y a deux formes de Semahs : les İçeri Semahs qui sont exécutés dans les Cems par les seuls fidèles dans le cadre des douze services ; les Dışarı Semahs qui sont exécutés indépendamment des services afin de promouvoir la culture du Semah aux jeunes générations. Le Semah est le moyen de transmission le plus important de la tradition Alevi-Bektaşi. Toutes les pratiques, les motifs et enseignements traditionnels se transmettent oralement et les genres distincts d’art et de littérature associés à la tradition continuent de se développer. C’est ainsi que les Semahs jouent un rôle crucial en stimulant et en enrichissant la culture musicale traditionnelle de la Turquie. |
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La tradition cérémonielle du Keşkek | 2011 | * pratiques sociales, rituels et événements festifs * connaissances et pratiques concernant la nature et l'univers |
Le Keşkek est un plat cérémoniel traditionnel turc, préparé pour les mariages, les cérémonies de circoncision et les fêtes religieuses. Femmes et hommes cuisinent ensemble dans de grands chaudrons le plat de blé et de viande appelé Keşkek qu’ils servent ensuite aux invités. Le blé est lavé la veille en récitant des prières, puis emporté jusqu’à un grand mortier en pierre au son du davul (tambour) et de la zurna (flûte à double anche). Dans le mortier, il est séparé du son par deux à quatre personnes qui le battent en rythme à l’aide de pilons. Le plat est généralement cuisiné à l’extérieur : blé décortiqué, morceaux de viande avec os, oignons, épices, eau et huile sont versés dans le chaudron et mis à cuire pendant toute la nuit. Vers midi, le plus costauds parmi les jeunes du village sont appelés pour battre le Keşkek à l’aide de maillets en bois, tandis que la foule les encourage de ses acclamations et que les joueurs de zurna interprètent des pièces musicales, annonçant l’épaississement du ragoût par une mélodie spécifique. De nombreuses expressions associées à ce plat – utilisées lors la sélection du blé, les bénédictions, les prières et le transport du blé, ainsi que pendant la préparation et la cuisson – sont devenues des expressions courantes de la vie quotidienne. De plus, la tradition inclut des divertissements, du théâtre et de la musique. Les villes et villages voisins sont invités à faire la fête ensemble dans les locaux où se déroule la cérémonie. La tradition de ce plat est sauvegardée et transmise par des maîtres cuisiniers à des apprentis. |
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Les festivités du Mesir Macunu | 2012 | * traditions et expressions orales * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers |
Les festivités du mesir macunu de Manisa, Turquie, commémorent le rétablissement de Hafsa Sultan, mère de Suleyman le Magnifique, qui fut guérie d’une maladie par l’invention d’une pâte connue sous le nom de mesir macunu. Hafsa Sultan demanda alors de diffuser cette pâte au public. C’est ainsi que tous les ans, du 21 au 24 mars, la pâte est préparée par un chef et ses apprentis à partir de quarante et une épices et herbes fraîches selon la pratique traditionnelle. Une équipe de quatorze femmes enveloppent la pâte dans des petits bouts de papier et vingt-huit imams et apprentis la bénissent avant de la disperser du haut du minaret et des dômes de la mosquée du Sultan. Des milliers de gens accourent des différentes régions de Turquie et rivalisent pour attraper les bouts de papier au fur et à mesure de leur dispersion. Nombreux sont ceux qui croient qu’ainsi leur désir de se marier, de trouver du travail et d’avoir des enfants se réalisera dans l’année. Un orchestre de quarante-cinq musiciens en costume traditionnel joue de la musique ottomane historique pendant la préparation de la pâte et tout au long des festivités auxquelles les habitants de Manisa sont profondément attachés. La force de la tradition crée un sens aigu de la solidarité au sein des communautés locales et la ville accueille des invités de presque toutes les régions de Turquie. |
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La culture et la tradition du café turc | 2013 | * traditions et expressions orales * pratiques sociales, rituels et événements festifs * savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel |
Le café turc allie des techniques spéciales de préparation et de cuisson à une culture commune riche en tradition. Les grains fraîchement torréfiés sont moulus de façon à obtenir une poudre fine ; on verse ensuite ce café moulu, de l’eau froide et du sucre dans une casserole que l’on met à cuire à feu doux pour que de la mousse se forme à la surface. Le café est servi dans de petites tasses avec un verre d’eau, et il est essentiellement consommé dans des cafés où les gens se retrouvent pour discuter, échanger des nouvelles et lire des livres. Cette tradition, ancrée dans le mode de vie des Turcs, est symbole d’hospitalité, d’amitié, de finesse et de divertissement. Une invitation à prendre un café entre amis offre l’occasion de parler d’un sujet intime ou de partager les problèmes du quotidien. Le café turc joue également un rôle important lors d’occasions sociales telles que les cérémonies de fiançailles et les fêtes ; les connaissances et les rituels sont transmis de manière informelle par les membres de la famille, à travers l’observation et la participation. Le marc restant dans la tasse est souvent utilisé pour prédire l’avenir de quelqu’un. Le café turc est considéré comme faisant partie du patrimoine culturel de la Turquie, il est présent dans la littérature et les chansons, et constitue un élément indispensable des cérémonies. |
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Ebru, l’art turc du papier marbré | 2014 | * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers * savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel |
L’ebru est l’art traditionnel turc qui consiste à créer des motifs colorés en appliquant des pigments de couleur au goutte-à-goutte ou au pinceau sur de l’eau à laquelle on a ajouté des substances grasses dans un récipient, puis à transférer ce motif sur du papier. Les dessins et les effets employés dans l’art du papier marbré sont, entre autres, des fleurs, des feuillages, des motifs ornementaux, des entrelacs, des mosquées et des lunes ; ils sont utilisés pour la décoration dans l’art traditionnel de la reliure. Les praticiens utilisent des méthodes naturelles pour extraire les teintures des pigments naturels, qui sont ensuite mélangées à quelques gouttes de bile de bœuf, un type d’acide naturel, avant d’être déposées au goutte-à-goutte ou au pinceau sur une préparation de liquide épaissi, où elles flottent en formant des motifs bigarrés. Les artistes, les apprentis et les praticiens de l’ebru considèrent leur art comme faisant partie intégrante de leur culture traditionnelle, de leur identité et de leur mode de vie. Leurs connaissances et leurs savoir-faire, tout comme la philosophie de cet art, sont transmis oralement et par la pratique dans le cadre de relations maîtres-apprentis. Il faut au moins deux ans pour acquérir le savoir-faire élémentaire de l’ebru. Cette tradition se pratique sans distinction d’âge, de sexe ou d’origine ethnique, et joue un rôle important dans l’autonomisation des femmes et l’amélioration des relations dans la communauté. L’art collectif de l’ebru encourage le dialogue à travers des échanges amicaux, renforce les liens sociaux et consolide les relations entre les individus et les communautés. |
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Note
La Turquie partage cette pratique avec l'Azerbaïdjan, l'Inde, le Kirghizistan, le Pakistan, l'Iran et en Ouzbékistan. |
2016 | * traditions et expressions orales * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et évènements festifs * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers * artisanat traditionnel |
Le Novruz, ou Nowrouz, Nooruz, Navruz, Nauroz, Nevruz, marque le nouvel an et le début du printemps dans une zone géographique très étendue, comprenant, entre autres, l’Azerbaïdjan, l’Inde, l’Iran, le Kirghizistan, le Pakistan, la Turquie et l’Ouzbékistan. Il est fêté chaque 21 mars, date calculée et fixée à l’origine en fonction des études astronomiques. Le Novruz est associé à des traditions locales diverses, par exemple l’évocation de Jamshid, roi mythologique d’Iran, à des nombreux récits et légendes. Les rites qui l’accompagnent dépendent des lieux, depuis les sauts par-dessus les feux et les ruisseaux en Iran jusqu’aux marches sur la corde raide, le dépôt de bougies allumées à la porte de la maison, en passant par des jeux traditionnels, tels que des courses de chevaux ou la lutte traditionnelle pratiqués au Kirghizistan. Chants et danses sont presque partout la règle, ainsi que des repas semi-sacrés familiaux ou publics. Les enfants sont les premiers bénéficiaires des festivités et participent à nombre d’activités comme la décoration d’œufs durs. Les femmes jouent un rôle central dans l’organisation et le déroulement du Novruz, ainsi que dans la transmission des traditions. Le Novruz promeut des valeurs de paix, de solidarité entre les générations et au sein des familles, de réconciliation et de bon voisinage, contribuant à la diversité culturelle et à l’amitié entre les peuples et les différentes communautés |
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L'artisanat traditionnel du çini | 2016 | * savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers |
Les çinis sont des carreaux traditionnels de faïence et de céramique faits à la main. Décorés de formes géométriques et de motifs végétaux et animaux multicolores, on les retrouve souvent sur les façades de bâtiments et de maisons de toute la Turquie. La fabrication des çinis se déroule suivant une série d’opérations. L’argile est d’abord modelée, couverte d’un premier apprêt, séchée et cuite dans des fours spécifiques. Des motifs représentant les coutumes et les croyances locales sont ensuite percés sur du papier avant d’être appliqués sur la poterie avec de la poussière de charbon. Les contours sont retracés à la main puis les couleurs appliquées sur la surface. La poterie est enfin émaillée et cuite. Les ateliers de çini intègrent des artisans, des superviseurs et des apprentis. Chaque artisan a un rôle spécifique : modelage, décoration et coloration, polissage, pose d’une sous-couche ou cuisson. Pour ses praticiens, le çini est un moyen de s’exprimer, de s’épanouir et de se sentir mieux. Il permet également de préserver une forme d’art qui est symbolique de l’identité culturelle de la Turquie et qui contribue à renforcer le lien entre passé et présent, en assurant sa continuité. L’art du çini ne se limite pas aux ateliers. Cette tradition est aussi pratiquée à la maison, dans des centres d’enseignement publics, des écoles professionnelles et des universités de tout le pays, où ni l’âge, ni le genre, ni l’origine ethnique n’entravent le partage des connaissances, la transmission et l’acquisition des savoir-faire. |
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La culture de la fabrication et du partage de pain plat Lavash, Katyrma, Jupka, Yufka Note
La Turquie partage cette pratique avec l'Azerbaïdjan, l'Iran, le Kirghizistan et en Kazakhstan . |
2016 | * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers * pratiques sociales, rituels et événements festifs * traditions et expressions orales |
La culture de la fabrication et du partage du pain plat dans les communautés d’Azerbaïdjan, d’Iran, du Kazakhstan, du Kirghizistan et de Turquie remplit des fonctions sociales grâce auxquelles cette tradition continue d’être suivie par de nombreux individus. La fabrication du pain (lavash, katyrma, jupka ou yufka) mobilise au moins trois personnes, souvent d’une même famille, qui ont chacune un rôle dans sa préparation et sa cuisson. Dans les zones rurales, le processus se déroule entre voisins. Les boulangeries traditionnelles fabriquent également ce pain. Il est cuit dans des tandyrs/tanūrs (fours en terre ou en pierres creusés dans le sol), sur des sājs (plaques métalliques) ou dans des kazans (chaudrons). Outre lors des repas habituels, le pain plat est partagé à l’occasion des mariages, des naissances, des funérailles, des vacances et des prières. En Azerbaïdjan et en Iran, il est posé sur les épaules de la mariée ou émietté sur sa tête pour souhaiter prospérité au couple alors qu’en Turquie, il est donné aux voisins du couple. Au Kazakhstan, la croyance veut que ce pain soit préparé lors de funérailles pour protéger le défunt en attendant la décision divine, et au Kirghizistan, le partage du pain assure au défunt un meilleur séjour dans l’au-delà. Cette pratique, activement transmise au sein des familles et de maîtres à apprentis, reflète l’hospitalité, la solidarité et certaines croyances symbolisant des racines culturelles communes et renforce ainsi le sentiment d’appartenance à la communauté. |
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L'Hıdrellez, fête du printemps Note
La Turquie partage cette pratique avec la Macédoine du Nord. |
2017 | * pratiques sociales, rituels et événements festifs * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers |
Tous les ans, le 6 mai, l’Hıdrellez, fête du printemps, est célébrée comme la Journée du printemps, ou le renouveau de la nature. « Hıdrellez » est un nom composé à partir de « Hıdır » et « İlyas », qui désignent, selon la croyance, les protecteurs de la terre et de l’eau, qui aident les individus, les familles et les communautés qui ont besoin d’eux. Pour célébrer cet événement, différents rituels et cérémonies liés à la nature sont pratiqués et apportent bien-être, fertilité et prospérité à la famille ainsi qu’à la communauté et protègent le bétail et les récoltes pour l’année à venir. L’élément est pratiqué par tous les participants, à savoir les familles, les enfants, les jeunes, les adultes, les danseurs et les chanteurs. Ces rituels ont des significations culturelles qui sont profondément ancrées et procurent à la communauté un sentiment d’appartenance et d’identité culturelle, en lui offrant la possibilité de renforcer leurs relations. Les communautés concernées assurent la viabilité de l’élément en participant à la Fête du printemps chaque année. La participation massive des individus, groupes et communautés est assurée par l’organisation complexe de manifestations aux niveaux local, régional et national. L’élément est considéré comme une composante essentielle de l’identité culturelle des communautés locales et les connaissances et les savoir-faire associés sont transmis dans les familles et entre membres de la communauté par la communication orale, l’observation, la participation et les représentations. |
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Héritage de Dede Qorqud/Korkyt Ata/Dede Korkut : la culture, les légendes populaires et la musique liées à cette épopée Note
La Turquie partage cette pratique avec l'Azerbaïdjan et le Kazakhstan. |
2018 | * arts du spectacle * pratiques sociales, rituels et événements festifs * traditions et expressions orales |
La culture, les légendes populaires et la musique liées à l’épopée de Dede Qorqud/Korkyt Ata/Dede Korkut sont fondées sur douze légendes, récits et contes héroïques et treize pièces musicales traditionnelles qui ont été partagés et transmis de génération en génération au travers des traditions orales, des arts du spectacle, des codes culturels et des compositions musicales. Dede Qorqud apparaît dans chaque récit comme une figure légendaire et une personne sage, un troubadour dont les mots, la musique et les témoignages de sagesse sont associés aux traditions qui entourent la naissance, le mariage et la mort. Dans les pièces musicales, c’est le son du kobyz, un instrument de musique, qui reproduit les sons de la nature, et les paysages sonores sont caractéristiques de ce support (tels que l’imitation du hurlement d’un loup ou du chant d’un cygne). Les pièces musicales sont toutes étroitement liées les unes aux autres par les récits épiques qui les accompagnent. L’élément qui véhicule des valeurs sociales, culturelles et morales telles que l’héroïsme, le dialogue, le bien-être physique et spirituel et l’unité ainsi que le respect de la nature, est riche de connaissances approfondies sur l’histoire et la culture des communautés turcophones. Il est pratiqué et perpétué par la communauté concernée à de multiples occasions – aussi bien des événements familiaux que des festivals nationaux et internationaux – et est donc bien enraciné dans la société, servant de fil conducteur entre les générations. |
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Le tir à l’arc traditionnel turc | 2019 | Le tir à l’arc traditionnel turc englobe les principes, les rituels et les pratiques sociales, la fabrication artisanale de l’équipement traditionnel, les disciplines du tir à l’arc et les techniques de tir qui ont évolué au fil des siècles. Dans le tir à l’arc traditionnel turc, différentes disciplines se pratiquent debout ou à cheval. Les détenteurs et les praticiens s’entraînent seuls ou en groupe pour progresser, s’exercent lors de séances de tir individuelles et participent à des compétitions et à des manifestations festives. La fabrication artisanale de l’équipement traditionnel est une composante essentielle de l’élément. L’équipement est fabriqué à partir de matières premières comme des arbres poussant dans certaines conditions climatiques en altitude, des colles organiques, la corne, les tendons, la soie et le cuir. Les artisans doivent donc disposer de connaissances approfondies sur la nature, y compris sur les plantes, les animaux et le climat. Les arcs sont généralement décorés de calligraphies, d’ornements et de marquèterie. Les artisans qui fabriquent les équipements traditionnels de tir à l’arc jouent aussi un rôle important dans la sauvegarde de l’élément, car les savoir-faire associés sont transmis de maître à apprenti ou acquis en autodidacte. Ces dernières années, le nombre d’archères et d’apprenties a augmenté de manière spectaculaire, tout comme le nombre d’organisations non gouvernementales impliquées dans le tir à l’arc dans diverses régions de la Turquie. Les détenteurs et les praticiens assurent la viabilité de l’élément en l’adaptant au monde d’aujourd’hui. |
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L’art de la miniature Note
La Turquie partage cette pratique avec l'Azerbaïdjan, l'Ouzbékistan et la Iran. |
2020 | * Connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers * Savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel |
La miniature est un type d’art en deux dimensions qui renvoie à la conception et la création de peintures de petite taille sur des livres, du papier mâché, des tapis, des textiles, des murs et céramiques et autres supports au moyen de matières premières telles que l’or, l’argent et diverses substances organiques. Historiquement, la miniature se définissait comme une illustration insérée sur une page afin d’appuyer visuellement le contenu du texte, mais l’élément a évolué et on le retrouve également dans l’architecture et en embellissement des espaces publics. La miniature représente visuellement les croyances, les conceptions du monde et les modes de vie et a également acquis de nouveaux caractères par le biais de l’influence de l’Islam. Bien qu’il existe des différences du point de vue du style, l’art de la miniature, tel que pratiqué dans les États soumissionnaires, présente des caractéristiques communes. Dans tous les cas, il s’agit d’un art traditionnel transmis par un mentor à son apprenti (éducation non formelle) et considéré comme faisant partie intégrante de chacune des identités sociales et culturelles de la société. La miniature présente un type de perspective spécifique dont la taille et les motifs changent en fonction de leur importance, ce qui représente la différence principale avec les styles réaliste et naturaliste. Bien qu’elle existe depuis des siècles, elle continue de se développer et de renforcer ainsi les liens entre passé et présent. Les techniques et principes traditionnels de peinture sont préservés mais les artistes apportent également leur créativité individuelle au processus. |
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Registre des meilleures pratiques de sauvegarde
modifierLa Turquie n'a pas de pratique inscrite au registre des meilleures pratiques de sauvegarde.
Liste de sauvegarde d'urgence
modifierPratique | Année | Domaine | Description | Illustration |
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3 Le langage sifflé | 2017 | * connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers * traditions et expressions orales |
Le langage sifflé est un mode de communication articulé permettant de dire des mots en sifflant. La pratique tire son origine des montagnes abruptes et de la topographie escarpée de la région, en raison desquelles la population locale a dû trouver une autre façon pour communiquer sur de longues distances. Les praticiens sont essentiellement des communautés agricoles qui passent la majeure partie de leur temps à l’extérieur. Les communautés concernées considèrent cette pratique comme un aspect important de leur identité culturelle, qui renforce la communication interpersonnelle et la solidarité. Bien que la communauté soit sensibilisée à l’importance de cette pratique, les développements technologiques et les changements socio-économiques ont entraîné le déclin du nombre de praticiens et de régions où il est pratiqué. L’une des principales menaces à la pratique est l’utilisation du téléphone mobile. L’intérêt de la jeune génération pour le langage sifflé s’est considérablement affaibli et l’élément risque d’être peu à peu arraché à son environnement naturel, pour devenir une pratique artificielle. Malgré ces menaces, les communautés ont activement encouragé cette pratique linguistique aux niveaux national et international afin d’assurer sa pérennité. Ainsi, le langage sifflé se transmet encore de génération en génération, des parents aux enfants, par des méthodes à la fois formelles et informelles. |
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